Bruno Belthoise / écrits

Les compositeurs portugais,
leur histoire à travers la musique pour clavier (1ère partie)


Lorsque l'on se penche sur l'histoire des musiques européennes, il est indéniable que dans le domaine de la musique dite "savante", le Portugal reste le grand inconnu. Il n'existe d'ailleurs pratiquement aucun ouvrage en français retraçant l'évolution du langage musical et la vie créatrice des compositeurs de ce pays hormis deux publications du Centre Culturel C. Gulbenkian de Paris (*) retraçant la présence en France de João-Domingos Bomtempo et de Francisco de Lacerda. Suivant un désir personnel qui m'a poussé à étudier au piano les œuvres des compositeurs modernes portugais, j'ai pu découvrir un patrimoine étonnant d'inventivité, d'une inspiration authentique, n'ayant aucune raison de rester plus longtemps éloigné des salles de concert et de la curiosité des mélomanes. Nous déplorons toujours la grande rareté des disques et des partitions à disposition du public français. Au Portugal, les travaux musicologiques qui ont débuté en 1959 avec les premières publications d'ouvrages et de fac-similés de musiques anciennes par le Serviço de Música de la Fondation Gulbenkian, permettent aujourd'hui une prise de conscience de la part des pouvoirs publics. En effet, depuis les années 1980, une politique suivie d'enregistrements a été soutenue par le Ministério da Cultura (distribués par Strauss mais toujours indisponibles en France), accompagnée depuis peu par un effort remarquable des éditions Musicoteca qui impriment enfin les œuvres du XXe siècle. Aujourd'hui, il me semble d'actualité de retracer succintement cette histoire de la musique à travers un répertoire particulièrement bien servi par les compositeurs portugais : celui des instruments à clavier depuis le XVIe siècle jusqu'aux œuvres pour piano des créateurs contemporains.
Dans le Portugal libéré en 1128 par Alfonse-Henriques, le caractère maure fit très vite place à des influences venues notamment de France. Le premier roi du Portugal était le fils du chevalier Henri de Bourgogne qui vint guerroyer contre les infidèles dans le nord de la péninsule. De cette occupation maure, nous sont parvenus quelques instruments comme la guitare (viola), le cistre (guittara portuguesa) et l'aduphe, sorte de tambour ressemblant à ceux du pays basque. On sait qu'au moyen-âge la musique sacrée prédomine. La liturgie grégorienne remplace officiellement le rituel mozarabe et au XIIIe siècle des troubadours provençaux sont appelés à la cour par Alfonso III (1248-1279), troubadour lui-même.
Au XIVe siècle, la
Capela Real, fondée par Denis 1er en 1299 est la principale institution musicale de l'époque. Ce roi-poète à la personnalité séduisante écrivit d'ailleurs lui aussi 138 de ces "Cantigas", poésies chantées et accompagnées au luth où l'influence provençale est tempérée par la mélancolie atlantique et les modulations arabes.
Aux XVe et XVIe siècles, la musique au Portugal s'est développée grâce aux compositeurs polyphonistes qui écrivirent pour le chant : Pedro de Escobar (1489-1535), Vasco Pires (1481-1509), Frei Manuel Cardoso (1566-1650), Duarte Lobo (1565-1646) et Filipe de Magalhães (1565-1652) notamment. Dans le domaine instrumental, c'est également au XVIe siècle que l'enseignement de l'orgue se développe au sein de nombreuses écoles et apparaissent alors des compositeurs comme Héliodo de Païva, Materis de Fontes et surtout Antonio Carreira (1525?-1599) qui pratiquait déjà le "ricercare" rigoureux, mode d'écriture qui donnera naissance à la fugue.
En ce début de XVIIe siècle prometteur pour l'écriture de clavier, un compo

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